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28 novembre 2013 4 28 /11 /novembre /2013 22:20

Il faut regarder mieux.

Paupières réversibles quand ça crève les yeux
 

 Il faut regarder mieux.

Du fond de la coquille

Sortir,

Sans manteau de colère,

Ranger l'inéluctable dans le tiroir à jouets,

Déferrer la monture dont les pas étincellent

Sur un chemin tordu.

Il faut regarder mieux

Ce qui gîte en ce creux

Chimère engrossée par un songe d'araignée

Ultime mélodie, petit bonheur papier

Cueilli sans y penser au bord de la jachère.

De l'illusion grinçante extraire le sourire

Et s'arracher la gueule sur le goût de la vie.

Il faut regarder mieux

De plus près, en silence

Ce qu'on pleure sur soi

Et pourquoi.

Quelle transe

Nous fait nous substituer...

Au fond du trou sans fond

Paupières réversibles

Un regard orphelin erre

Et il n'a pas de cible.

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10 novembre 2013 7 10 /11 /novembre /2013 21:18

Le décès de Gaëlle m'a rappelé des souvenirs.... 

 

 

Je n'aime pas ça, dit-il en faisant glisser l'instrument sur ma peau, dans la gelée visqueuse.
Il arrête et clique. Agrandit l'image. On dirait une carte d'état major un peu chargée. Enfin, telles que j'imagine les cartes d'état major.
Me montre la masse, là. Mais il vaut mieux faire une radio, plus fiable. Sans tarder.
Il contacte son collègue pour un rendez-vous. Dans deux jours. Et ne vous tracassez pas.
 
Le collègue n'est pas causant. Il me regarde fixement et dit : "c'est vascularisé. Vous voyez, là."
Je vois. Mais quoi ?
Il répète : "c'est vascularisé", comme s'il s'excusait.
Je sens qu'il y a probablement quelque chose à comprendre et une limace froide glisse dans mon estomac avant que le sens ne me parvienne.
Voilà, ce n'est pas un kyste, un truc superflu, exogène, qu'on enlève. C'est vascularisé .
Je le nourris de mon sang. Comme un bébé.
Des fois on a un enfant.
Des fois on a un cancer.
Mauvaise pioche.
Dans la salle d'attente, des gens gris. Une femme a les yeux rouges.
Je prends un magazine en attendant qu'on m'appelle à la caisse. La mode est jolie, cette année.
Le temps est lisse et glisse sans à-coups, comme saturé d'anesthésiant .
J'entends mon nom. Je me lève et vais régler ; une immense absence stagne dans ma tête.
Je sors.
Et on fait quoi maintenant ?
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22 octobre 2013 2 22 /10 /octobre /2013 00:52

Les petits contretemps sont finis pour elle.

Lisez son livre, d'abord parce qu'il est  beau et parce que vous n'aurez jamais l'occasion d'en lire un autre d'elle : Gaëlle Héaulme  vient de mourir.

J'ai  autant de chagrin que  si j'avais perdu une frangine, bien que je ne l'aie jamais rencontrée.

Il reste ses mots, si pleins de vie, de pugnacité, des mots qui posent sur le monde un regard si juste qu'on  peine à croire  que ce regard puisse s'arrêter.

Lisez son livre, vous comprendrez  quelle grande dame  vient de nous laisser,  dans un monde soudain rétréci...

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7 octobre 2013 1 07 /10 /octobre /2013 22:44

Il n'a jamais tort.
Ou alors, avec de bonnes raisons. Qu'il me détaille, pour que je comprenne bien.

Il est midi moins douze, je n'ai rien de prêt, et ça urge, à cause du diabète.
Il dit :
− D'accord, je me suis trompé... mais pas complètement quand même.
Je dis :
− Ça ne fait rien, on
Il me coupe :
− Non mais attends, laisse-moi t'expliquer, sinon tu ne peux pas comprendre.
Je fais trois pas vers la cuisine.
Il s'offusque :
− Mais je ne peux pas te parler si tu me tournes le dos !
Je lui dis :
− Il faut que je fasse à manger.
Il me suit dans la cuisine.
Commence une saga remontant jusqu'aux temps préhistoriques, censée justifier son erreur.
Le rapport m'échappe, et j'ai le malheur de le dire. Il me bombarde alors de questions destinées à s'assurer que j'ai bien écouté. J'ai l'impression de subir un examen.
Je lui dis :
− Bon, écoute, on ne va pas y passer la journée...
− Non, mais je veux que tu comprennes bien que
Je change de tactique et demande :
− Tu préfères des sardines ou du pâté en entrée ?
J'ai un instant d'espoir parce qu'il s'enquiert :
− Du pâté de quoi ?
− De sanglier
Mais c'est raté, le sanglier ne fait pas le poids et la démonstration en cent soixante douze points reprend.

J'ai un peu perdu le fil, mais on doit en être à quatre arguments. Spécieux. Voire hors sujet. L'expérience toutefois me commande de n'en rien dire.
Nous mangeons.
Au dessert, le débit commence à faiblir. Il me dit :
− Bon, je te passe le reste. Tu comprends maintenant pourquoi j'ai cru ça.

J'ai un léger mal de tête.

C'est la même erreur que la semaine dernière, il y a quelques variantes dans les explications, mais dans l'ensemble, il s'est très bien souvenu de son argumentaire.

Il pourra me le resservir, renforcé, la prochaine fois qu'il se trompera sur le même sujet... mais pas complètement quand même.

 

 

 

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5 octobre 2013 6 05 /10 /octobre /2013 13:34

J'ai posé près du téléphone le petit cadavre, encore tiède dans son sac plastique.
Le combiné pèse une tonne.
- Allo ?
Ma gorge se contracte. Je dis :
- J'ai fait piquer Snaffu.
- ... Ah.
Près du recepteur, un petit fantôme a dressé l'oreille, battu de la queue, une fois, deux fois, puis graduellement cessé.
Silence.
Silence.
Je ne sais à qui s'adresse la pitié qui déborde de moi.
- Je voulais quand même te le dire.
- Bon.
C'est tout ; je raccroche.
Le monde vient de se déchirer à nouveau.
Quarante ans plus tard, je regarde les yeux tendres d'une petite chienne qui ne s'appelle pas Snaffu et ça me fait encore froid.

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30 septembre 2013 1 30 /09 /septembre /2013 23:18

Voilà, enfin, ça y est : le livre de Gaëlle Heaulme   va paraitre !!!

 

Ceux qui avaient lu ici " Zones inondables" ( retiré pour cause de publication) se souviendront : j'avais prédit qu'on parlerait de Gaëlle.

Ce style à la fois rêveur et incisif, cette façon inimitable de vous arracher le coeur sans effets superflus, cet humour féroce  et tendre, c'est Gaëlle Heaulme !


Et les éditeurs ne s'y sont pas trompés ( ça fait plaisir  de voir  que certains  continuent à publier  des inconnus  uniquement parce qu'ils  ont du talent !)  Et pas n'importe quel éditeur, excusez du peu :  BUCHET CHASTEL.


Alors courez le commander  il sort le 03.10.2013

 

Si vous le regrettez, je vous autorise à venir m'injurier, me traiter, me vilipender, m'insulter, me couvrir d'opprobre tous les jours  à partir du 4 octobre ( ben oui, je suppose que vous lisez un livre par jour, non ? ) et ce jusqu'à ce que je crie grâce !

 

 

 

LES PETITS CONTRETEMPS 

de Gaëlle Heaulme

ISBN 9782283027011

Prix : 15 €

(En plus, Gaëlle Heaulme est une femme  remarquable)

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25 mars 2013 1 25 /03 /mars /2013 15:06

La rencontre avait eu lieu après de multiples tergiversations de la part de Ralph. Il m’avait prévenue. Mais j’imaginais que ma volonté de me faire apprécier aurait raison de tout.

Je me voyais la séduire, lui faire partager mes enthousiasmes : nous aimions le même homme après tout !

J’aurais voulu lui faire goûter ma cuisine, lui prêter mes livres, j’aurais aimé l’emmener à bord de mon kayak, pour lui faire ressentir le plaisir de filer au ras de l’eau !

Par quel invraisemblable concours de circonstances, cette femme blonde si sophistiquée  avait-elle pu engendrer mon Ralph ?

 

La première fois, elle m’a regardée comme j’ai regardé le cancrelat qui est sorti de sous l’évier l’autre soir : avec un mélange de curiosité, d’incrédulité et cette démangeaison indéfinie «  avec quoi je peux éradiquer ça ? »

 

- Chère petite, m’a-telle dit, parlez moi de vous. A quoi diable passez vous vos journées ?

Alors que j’essayais de lui expliquer qu’entre les concours, le kayak, les soins aux mourants et le bonheur de son fils j’avais peu de temps pour jouer au whist, elle s’était tournée vers Ralph :

− Chéri, la vieille madame Sostenospoulos m’ a encore demandé de tes nouvelles hier, elle aurait tellement aimé te présenter sa nièce, une jeune femme d’une grande beauté, à ce qu’on dit….

Pardon, chère Sophie, vous disiez ?

Je regardais ses bijoux, elle portait un sautoir de perles qui lui descendait aux genoux, qu’elle nouait et dénouait nonchalamment, ses ongles étaient laqués du même blanc nacré et ses saphirs sertis des mêmes rides platinées que ses  petits yeux. Elle était vêtue d’une soie bleu pâle qui évoquait l’eau d’une cascade.

− Maman est un peu froide, au début, m’avait prévenue Ralph…

 

Lorsque je l’ai revue, elle avait oublié mon prénom.

 

− Vous n’allez tout de même pas vous marier ? demanda-t-elle à son fils, c’est si démodé !

Elle m’offrit un coffret de savons 

J’ai cherché quelque chose qui puisse vous être utile, chère enfant…. 

 

Elle vivait dans un gigantesque appartement dont les volets demeuraient clos en permanence. Souvent, nous la trouvions assise dans une sorte de trône doré, hiératique, paupières fermées, habillée de vert céladon et maquillée comme si elle revenait d’une soirée de gala.

Le son de nos voix la tirait de profondeurs insondables et ses yeux avaient alors un éclat méchant qui me glaçait.

Elle écoutait intensément cette voix derrière la chose et s’agaçait de ce que nous pouvions avoir à lui dire.

 

Quand je suis entrée, ce jour-là, elle souriait.

Cela me mit mal à l’aise.

Elle me tendit un billet de train : Pour votre retour, me dit-elle.

− Et Ralph ?

− Mon fils et moi partons faire une croisière  au cercle polaire… On m’a souvent dit que je ressemblais à une aurore boréale….

− Et moi ?

− Vous ? Elle ouvrit des yeux étonnés.

                                      ***

 

Finalement, nous l’avons faite, cette balade en kayak.

Je l’ai emmenée, emmitouflée dans ses fourrures. Le kayak filait au ras de l’eau.

La débacle ne tarderait pas.

Une petite plate-forme de glace me séduisit. C’était l’ endroit adéquat où la déposer. L’iceberg, quatre cents mètres plus loin, projetait une ombre qui  aurait pu la faire paraître livide si je ne l’avais pas peinte en rouge.

Rouge sicilien.

Il était temps que cette femme  renonçât aux couleurs froides.

 

 

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18 mars 2013 1 18 /03 /mars /2013 00:17

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Elle a eu dix-sept ans hier soir. Après avoir beaucoup hésité.
Pauvre petite Emmy !
Elle attend toujours son père pour la bercer de sa voix océanique…
J’ai beau la pousser à sortir, à rencontrer des gens, elle se prépare, se fait ravissante ( cette bouche ourlée, ces yeux de chérubin, cette taille si fine…) puis prise de doute, elle défait son maquillage, remet un pull informe et rentre dans sa chambre écouter de vieux tubes des Beatles en pensant à Jim.
Jim, t’es un salaud ! Pourquoi tu fais ça à ta fille ? Je sais : « pour l’aider à prendre une décision » ! La vérité c’est que tu en as la trouille !

Je l’entends ouvrir sa fenêtre. Elle aime bien faire ça les soirs de printemps, rester longtemps à regarder l’horizon, loin là-bas où tu habites.
Elle n’a encore pas mangé ce midi. Elle semblait toute perturbée. Elle m’a dit « Marine, tu … non rien. »
J’attends toujours qu’elle me parle. Je ne sais pas bien aller au devant des adolescentes. Surtout quand elles sont la fille de Jim.
Qu’est-ce que je peux lui dire qui ne précipite pas les choses ? Au fond, elle sait bien…

Elle marche comme une danseuse sur un fil. Si légère…

Aujourd’hui elle a écrit pendant plusieurs heures et jeté le tout dans le vide-ordures. Et elle m’a raconté en détail le menu d’anniversaire de sa copineTania sans omettre un zakouski.
- Tu aurais aimé qu’on te fasse un anniversaire comme ça ?
Elle a hésité.
- Je ne sais pas …
Il m’en coûte de ne rien faire. Si je n’avais pas promis à Jim…

Elle revient du restaurant où Sosthène et Alia l’ont invitée. Elle range vite dans un tiroir une drôle de petite poche rouge. Elle a l’art de noyer le désordre.
-Emmy, pourquoi ? Donne moi une raison…
- Pourquoi j’aurais besoin d’une raison ? J’aimais pas ça, c’est tout.
Dans la drôle de petite poche rouge, il y a une cuisse de canard. Intacte.

Elle m’apprend qu’elle a reçu aujourd’hui son premier prix littéraire. Elle a l’air un peu fière. Et un peu paniquée. Tiraillée entre ces deux sentiments. Je l’ai félicitée. Très vite elle a dit : « J’voudrais téléphoner à Papa »
Et immédiatement après : « Non, non ! »
Je reste aussi neutre que possible, mais ça me met en colère. Je sais bien qu’on est seul dans notre peau… mais ne rien pouvoir faire…

Je l’ai emmenée boire un jus d’abricot à la terrasse du Blue Swallow. Elle l’a bu presque en entier. Ses jambes étaient sans cesse en mouvement sous la table. Dans sa tête elle ne cesse de courir.
- Tu l’as connu quand il était jeune, Papa ? Comment il était ?
- Il te ressemblait beaucoup, mais lui c’était un gaillard. ( le mot la fait rire) Tout jeune il avait pris le chemin des volcans..
Je n’ajoute pas « déjà »…

Elle a hésité puis m’a dit : « je l’aime encore, Papa, tu sais… »


Elle est de nouveau assise sur le rebord de la fenêtre, les jambes pendantes à l'extérieur. Un souffle suffirait à la faire envoler.
Hier elle a perdu une autre dent.

La radio joue un morceau de Jim qu’il a appelé « A la mémoire d’un ange »

Elle hésite.

 



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14 mars 2013 4 14 /03 /mars /2013 13:06

 

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On parle toujours de la fameuse Chapelle Sixteen… mais qu’est-ce qu’elle a de plus que les quinze autres ?...

 

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12 mars 2013 2 12 /03 /mars /2013 19:09

Tant d’enfance rebâtie dans nos regards croisés

Ce temps bleu arrêté où circulaient des anges

Qui regardaient ailleurs

Ces baisers étonnés ces baisers qui se mangent

La blanche cathédrale enfouie sous nos draps

 

Ce que l’on sait

L’intime le profond

La marche dérapée la mêlée et l’envol

L’arc électrique...

 

homme-reflet-d-ennui.jpgJ’ai tout retrouvé

                              Lorsque sur ta photo

                              Soudain

Me suis brûlé les doigts

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  • : Le blog de Coline Dé
  • : J'écris pour regagner en largeur ce que ma vie perd en longueur...
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  • Coline Dé
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 Bricoleuse de mots, déboulonneuse de socles, dévisseuse de certitudes, j'ai envie d'un monde  où le rire libre lézarderait les murs. Juste pour la beauté des lézardes.
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