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23 septembre 2008 2 23 /09 /septembre /2008 22:32

 

Elle est en train de laver son joli pull de cachemire rouge, celui qui offre ses seins dans un nid duveteux, avec un décolleté rond plein de promesses. Elle a choisi celui-là sans réfléchir, c'est celui qui la rassure le plus. Il a quelque chose de spécial, dont elle a besoin pour se donner du courage. Un moment, elle a hésité : remettre le chemisier qui avait provoqué ce regard si …

Elle repousse du coude les mèches sur son front, tandis que  ce regard s'empare d'elle de nouveau, lui tombe dessus, tellement inattendu. Un collègue. Quelqu'un qu'elle côtoie tous les jours depuis plus de deux ans. Avec qui elle a de bons rapports, comme on dit.

Mais rien de plus. D'ailleurs, jamais rien de plus, avec personne.

Sauf ce matin dans l'ascenseur. Ils n'étaient même pas seuls.

Le nez dans ses papiers, elle parlait d'un dossier qu'ils avaient à boucler ; ne sentait pas de répondant. Ca l'avait cueillie en relevant la tête : il fixait l'échancrure de son chemisier, absent à tout ce qui n'était pas sa chair.

La douceur, la profondeur, l'intensité de ce regard avait tout submergé, elle avait senti se réveiller un corps oublié, un ventre de délices, des reins amoureux, de la soie et du velours, des langueurs, des élans, de la chaleur, un étonnement : Tiens, il existe encore celui-là ?

Tellement différent de celui auquel elle accordait quelques sèches masturbations.

Elle n'avait pu s'empêcher de passer la main dans l'échancrure, pour remonter une bretelle menteuse et avait joui du vacillement perçu dans le regard de l'homme.

Quel cadeau ! Ce regard ressuscitait son âme, Euh, drôle de façon de localiser l'âme…Bon, disons : sa féminité.

Mais non, c'était plus que ça : comme si la vie lui était rendue ; elle avait oublié de vivre depuis Xavier : ce qui avait continué à parler, bouger, bosser était une enveloppe vide, une sorte de poupée gonflable désexualisée.

D'un regard, il avait rempli de chair, de sensations cette vacuité … Elle venait de  comprendre ce qui se passait dans la  Belle au bois dormant. Il n'y avait même pas besoin d'un baiser.

 

Elle est debout, face à l'évier, les mains immobiles dans la lessive depuis trente sept minutes. La peau de ses doigts est toute ridée. La scène de l'ascenseur, ce matin… Elle a vécu un grand moment amoureux.

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commentaires

L
Une poupée gonflable désexualisée : okay !<br /> Une impression tellement présente, parfois. Mais je ne travaille qu'avec des enfants alors adieu décolletés ! ^^<br /> J'aime vraiment beaucoup ce texte. Toujours.
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 Bricoleuse de mots, déboulonneuse de socles, dévisseuse de certitudes, j'ai envie d'un monde  où le rire libre lézarderait les murs. Juste pour la beauté des lézardes.
  • J'écris pour regagner en largeur ce que ma vie perd en longueur... Bricoleuse de mots, déboulonneuse de socles, dévisseuse de certitudes, j'ai envie d'un monde où le rire libre lézarderait les murs. Juste pour la beauté des lézardes.

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